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Mini-bio/interview de Jean-Charles Poupard

Le festival débute ce samedi, et pour vous faire patienter, nous vous proposons une interview pour mieux connaitre Jean-Charles Poupard, le dessinateur en charge de la superbe affiche du festival de cette année. Nous lui remercions de s’être prêté à cet exercice. Bonne lecture !

1/ Que dessinais-tu quand tu étais petit ?

J’ai eu de nombreuses phases !

Je me souviens que lorsque j’étais en primaire, je dessinais aussi bien des flamands roses – car j’adorais ces animaux, je les trouvais gracieux dans leur disproportion, élégants et à part, comme s’ils sortaient d’un livre – que des monstres patates, c’est-à-dire que je faisais une sorte de silhouette de pomme de terre pleine de bosses, puis dans chaque bosse et chaque creux, j’insérais des yeux injectés de sang, des dents monstrueuses, des armes, des boyaux qui sortaient et toutes sortes de choses terrifiantes… C’était certainement pour contrebalancer la mièvrerie de ces putains de flamands roses !

J’avais besoin de sortir les choses les plus douces comme les plus affreuses qui me passaient par la tête ! Quand je suis arrivé en Bretagne, je me suis mis à dessiner des trolls, des lutins, des créatures de la forêt, des forêts aussi du coup, des arbres, des cascades, des paysages d’autres planètes, je développais mon imagination, j’avais ces visions en me couchant d’autres mondes, des choses très précises, que je m’efforçais de refaire sur papier les jours qui suivaient. Cela s’accompagnait naturellement de lectures qui allaient dans ce sens (Lanfeust de Troy par exemple, ou Les Gardiens du Maser).

Un peu plus tard, naturellement, je me suis aussi mis à dessiner des meufs à poil, en tant qu’homme hétéro qui savait un peu dessiner, pouvoir poser sur papier mes propres fantasmes était un privilège dont je ne m’interdisais pas de jouir ! Fallait juste que je les cache bien pour ne pas que ma mère tombe dessus, héhé ! Mais bien avant ça, je me suis assez rapidement essayé à la bande-dessinée en fait !

Dès le collège ! Je me souviens d’une pièce de théâtre avec Michel Leeb, je crois, que j’avais vu avec mon père un soir à la télévision, où il incarnait plusieurs personnages en même temps qui se cachaient à tour de rôle pour je ne sais plus quelle raison. L’un des personnages était peintre, l’autre ne l’était pas (du tout), alors l’une des comédiennes finissait par demander son portrait à celui qui ne l’était pas (évidemment) : le dessin que Michel Leeb réalisait alors sur scène face au public était tellement grotesque que ça m’a fait mourir de rire et dès le lendemain, je m’exerçais à le refaire, puis à le mettre en situation. De ces situations, se sont construites des scènes, des strips et des pages ! Et depuis je n’ai pas arrêté de faire de la BD, je crois ! J’avais 10 ans ! En résumé, c’est un peu grâce à Michel Leeb si je fais de la BD aujourd’hui… comme quoi !

Bon, il faut dire que mon père en lisait un peu et je me suis exercé aussi en recopiant des personnages de BD qu’il y avait à la maison : Largo Winch, Astérix, Yakari, puis plus tard Lanfeust, les personnages de Loisel, puis plus tard encore Le Troisième Testament, le travail de Lauffray, et je continue encore aujourd’hui de découvrir de nouveaux auteurs et de m’inspirer d’eux ! Toujours !

2/ C’est qui ton héros de BD préféré ?

J’en ai eu plein suivant les âges !

Mais de manière générale, je n’ai pas de personnage préféré en particulier, car le drame d’être auteur, c’est que je ne rentre jamais entièrement dans une bande dessinée, je reste toujours lecteur-dessinateur avec un point de vue analytique sur la narration, le dessin, la couleur… ce qui fait que je ne crois jamais vraiment complètement aux héros ou personnages principaux… mais allez, on va dire Long John !

3/ Comment as-tu commencé la BD ? Qu’est ce qui t’a fait connaitre ?

En premier lieu, donc, grâce à Michel Leeb !

Puis, des années plus tard, grâce à Laurent Miny, qui m’a mis en relation avec Jean-Luc Istin alors que j’étais encore élève à l’école Pivaut à Nantes, car il cherchait du sang neuf pour la collection 1800 ! Ils m’ont fait confiance, estimaient que j’avais le niveau, et m’ont confié Jack l’éventreur pour commencer !

4/ Comment es-tu arrivé sur le projet du Chant des Runes ?

Par le biais de Timothée Montaigne, que j’avais eu en prof à Pivaut et qui m’avait pris sous son aile à mes débuts – je ne le remercierai jamais assez pour tout ce qu’il m’a appris.

Il travaillait à l’époque sur Julius aux éditions Glénat, et m’avait présenté son éditeur Philippe Hauri. Celui-ci fut intéressé par mon travail, et m’a recontacté quelques semaines plus tard pour me parler de ce projet de polar nordique entre X-files et Millenium avec Runberg au scénario (que je ne connaissais pas du tout).

Il s’avérait que j’avais fait une partie de mes études à Oslo par amour des pays scandinaves, donc lorsque ce projet – qui réunissait les trolls que je dessinais lorsque j’étais ado, les trucs glauques et gores que j’exprimais presque malgré moi depuis gamin dans mes dessins et le contexte scandinave – m’a été proposé, j’ai dit oui sans hésitation ; c’était trop beau pour être vrai.

5/ As-tu un moment préféré dans la journée pour dessiner ?

J’aime bien le matin, lorsque je suis en forme, tout y est plus simple : la perspective, le crayonné, l’encrage, l’anatomie ; je ne suis pas encore trop en train de mentaliser les choses et de me bloquer. La main semble dessiner de manière intuitive, c’est hyper agréable ! Et le résultat souvent positif, heureusement !

La nuit c’est pas mal aussi, tout est calme, le temps est différent, et je sais que je ne vais pas être interrompu…

Mais bon, là j’ai un enfant en bas âge, donc pour l’instant le moment préféré dans la journée pour dessiner est : quand je peux !

6/ Ecoutes-tu de la musique quand tu dessines ? Si oui, lesquelles ?

En général oui, et la nature de la musique va dépendre de l’addition de mon humeur et de ce que j’ai à dessiner : une scène d’action ou d’enterrement ne demanderont pas la même intention et donc la même énergie pour travailler.

J’ai écouté énormément de musiques de film pendant des années, mais vraiment beaucoup, et là ces derniers temps, j’avoue que je varie, j’ouvre mon répertoire de musique de travail : ça va de Stupeflip à AC/DC, en passant par MIA et John Lee Hooker…

Mais c’est chiant car choisir la bonne musique prend du temps, et plus ça va, plus en fait le bruit m’empêche de me concentrer, et je commence à faire partie de ces auteurs qui doivent travailler en silence ; à mon grand regret, car j’adore écouter de la musique !

7/ Quelle bande son conseillerais-tu à la lecture de tes différents albums ?

Oula, pas facile !

Alors, on commence avec Jack l’éventreur, du coup il faut être dans quelque chose de long, en mineur, un peu étouffant et épais : des cordes et des cuivres… Quelque chose de lourd, répétitif, je verrais bien une musique de Max Richter par exemple, la BO de la série Taboo ! Sublime !

Pour les Maîtres Inquisiteurs, on est dans quelque chose de complètement différent, c’est plus rock, plus de second degré, quelque part entre Airbourne et la BO de Pacific Rim de Ramin Djawadi !

Enfin, pour Le Chant des Runes, c’est plus complexe car on oscille entre différents genres : on commence avec quelque chose de sourd et lancinant, assez lent, comme l’album Mythology of the Metropolis de Deceptikon, et puis on alterne avec Wardruna et la BO de Dunkirk de Hans Zimmer ! Toujours efficace ce bon vieux Hans !

8/ As-tu le temps de lire d’autres albums ? Si oui lesquels t’ont marqués ?

Alors, ces derniers temps, je n’ai pas lu grand-chose, je dois l’avouer, mais j’ai pu admirer Gung Hoet je suis assez curieux de la fin qu’ils nous réservent, c’est assez efficace je trouve !

Katanga, j’ai beaucoup aimé la mise en scène et l’écriture, cette histoire d’individus qui cherchent tous à tirer leur épingle du jeu dans une situation désespérée, dans un contexte qu’on a peu l’habitude de voir en BD en plus !

Et puis il y en a tellement que j’ai achetées qui ont l’air excellentes mais que je n’ai pas eu le temps d’ouvrir ! Dans une autre vie, peut-être…

9/ Tu as toujours collaboré avec des scénaristes sur tes albums. La réalisation d’un album en solo, est-ce une envie ou un but pour toi ?

Je pense que j’ai encore quelques petites choses à apprendre en dessin et en découpage avant de m’atteler à un album en solo ! Mais j’ai déjà des projets dans les tiroirs, ça va venir !

10/ Tu viens de finir le 4ème tome du Chant des Runes, maintenant quels sont tes nouveaux projets ?

Je suis sur Orcs et Gobelins, le tome 9 normalement, puis j’enchaine sur Les Griffes du Gévaudan, en deux tomes et couleur directe, avec Sylvain Runberg au scénario également, en parallèle de la suite du Chant des Runes, qui nous conduira au moins jusqu’à un tome 6 ! On va dire que mon agenda est bien rempli pour plusieurs années.

11/ Roch’fort en Bulles pour toi ?

L’un de mes premiers festivals à la sortie de Jack l’éventreur, et synonyme de bonne ambiance à chaque fois ! Donc comme en amour : tant que c’est bon, on fait durer le plaisir !

Merci Jean-Charles d’avoir répondu à nos questions.

1 commentaire pour “Mini-bio/interview de Jean-Charles Poupard”

  1. Bonsoir Monsieur,

    Je ne suis pas à proprement parlé un passionné de BD car je suis très vagabond d’un auteur à l’autre, mais la qualité des dessins me touche et l’affiche que vous avez réalisé pour cette édition 2019 est simplement magnifique. J’ai cherché de quel ouvrage elle était tirée mais il semblerait qu’elle soit sortie de votre imagination et de votre fabuleux coup de crayon. Je viens de commander la série le chant des runes afin de mieux vous connaitre.
    Sauriez-vous s’il est possible d’acquérir cette affiche et dans l’affirmative, par quel biais?
    Je vous remercie de votre réponse et vous souhaite bonne continuation.
    Bon week-end.
    Laurent CHICHERY

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